jeudi 7 août 2008

Tout est à la bonne place

Il existe une expression consacrée dans les conversations entre amateurs de musique: "J'étais là, esti!" Dans un débat, notamment, cette phrase est un atout hors du commun. Essayez de convaincre un amateur de Led Zep que les guitares sonnaient mal en 1972 dans les petites salles, et il vous balancera un puissant "Je le sais, j'tais là!", et vous n'aurez d'autre choix que de vous fermer la boîte.


Le show de Radiohead hier au parc Jean-Drapeau valait un "J'étais là" du début à la fin. Le simple fait d'être sur place relevait d'abord de la bravoure (ou de l'insouciance): voyez un peu ce nuage menaçant qui nous guettait au départ moi et mon amie Cab. Ça ne donnait pas envie de se mettre en t-shirt, oh non.

Sur le site, après un line-up d'un peu moins d'une heure (vraiment pas si mal), de la grosse pluie fatiguante tombait sur nos têtes, vous savez, le genre de pluie qui s'écrase en grappe sur les fronts une fois aux trente secondes. Je mets-tu mon imperméable ou je le met pas? Déchirante question qui s'est heureusement résolue d'elle-même au début du spectacle, puisque la pluie a diminué à partir de ce moment. Après Osheaga et le coucher de soleil, on a été gâté. Notons tout de même que le soulier Converse a laissé sa place à la botte de pluie en tant qu'élément de mode indie.

(Random fact: après la première partie, je me suis lancé vers les kiosques à bouffe avec la ferme intention de conquérir un sac de chips avec les 3$ que j'avais trouvés dans le fond d'une poche. Eh ben, rendu sur place, j'ai trouvé un légendaire 2$ qui m'a finalement permis de revenir avec un nachos fromage et sauce piquante! Un mélomane à l'estomac rempli est un mélomane heureux, je vous jure.)

Je ne sais pas trop quoi dire sur le show en lui-même, ce qui peut paraître bizarre un peu, mais non, j'avais les mains dans les poches, un gros sourire cave dans la face et les yeux à demi-fermées, alors je ne suis même pas certain que j'étais là, peut-être ai-je passé la soirée au parc Lafond à m'imaginer un concert qui avait lieu à des kilomètres de là?

Quand même, je crois avoir entendu 15 Steps en ouverture, puis (pas dans l'ordre nécessairement), All I Need, Nude, The National Anthem, Idioteque, Weird Fishes, Videotape, Like Spinning Plate et Fake Plastic Trees. (Photo: La Presse)

Mais tout ces hits ne valent rien à côté de la joie juvénile que j'ai sentie quand ils ont lancé JIGSAW FALLING INTO FREAKIN' PLACE!!!! Épelez G-É-N-I-E drette ici. Quelle ambiance, quel crescendo magnifique, quelle voix maîtrisée, quel set de lumières, quel n'importe quoi!

Deux autres coups de coeur: You And Whose Army?, je m'excuse, mais personne ne l'a vu venir, et elle était simplement hallucinante. Je sais qu'on a juste le droit de dire "C'est ma toune" une fois dans un concert, mais je n'ai pas pu m'empêcher de le crier pour celle-là, même si j'avais utilisé mon droit pour Jigsaw. Que voulez-vous, je suis un rebelle. Mentionnons aussi Everything In Its Right Place en fermeture; avec sa finale démantibulée, déconstruite, ça nous a laissé sur une belle note (sans mauvais jeu de mot).

Il y a eu des feux d'artifices (ceux de La Ronde, qui ont d'ailleurs fait pouffer de rire Yorke pendant Reckoner Faust Arp, très drôle) et aussi un extrait radio de Gilles Proulx avant National Anthem. Deux belles petites anecdotes.

Dans trente ans, quand Radiohead sera devenu le Pink Floyd ou le Led Zeppelin d'une génération (avec une telle discographie doublée d'un accueil critique si glorieux, nul doute que c'est ce qui s'en vient), moi et les 35 000 autres personnes pourront dire qu'ils ont vu le show de l'année en 2008. Je le sais, j'étais là!

2 commentaires:

Cab a dit…

L'histoire des nachos t'as vraiment marquée ma foi!

Je suis d'accord par contre, Jigsaw a été un moment fort. En tout et pour tout, c'est l'expérience, le moment qui a fait que ça a été si bon. Parce qu'entre toi pis moi, j'ai vraiment mais vraiment pas vu grand chose.

Les Converse auraient pas valu grand chose dans ces conditions. Mes bottes en témoignent.

Patch a dit…

Par rapport au «j’étais là», j’ai eu le même feeling. Probablement dû au fait que pour la première fois de mon existence, j’entendais Moanin' Thom d’homme à homme, sans passer par un enregistrement quelconque. De Yorke au micro, à la console, au speaker, à travers l’air mouillé jusqu’à mon typan, qui a relayé chaque miliseconde d’orgasme auditif à mon cerveau. Rien de plus. Voilà, mon baptême de show de Radiohead était fait.

À quelqe part là-dedans, il y avait moi, détrempé, étendu sur ma bache, l’air catatonique et béat alors que, 35 000 personnes plus loin, Nude jouait live. En temps normal, j’aurais ragé de ne pas avoir entendu Street Spirit et No Surprises, mais Moanin’ Thom et sa bande nous en ont tellement donné que, finalement, ça m’a passé un peu par-dessus la tête...